« Au sujet de la rapidité d’être sophrologue »

Apprendre la sophrologie, c’est un peu comme « apprendre » la philosophie
En fait cela n’est pas possible, on n’apprend pas la philosophie.
On découvre un texte, on rentre dedans, on ressent ce dont il parle, on éprouve les mots, on les vit, on digère et enfin on peut rendre, redonner ce que l’on a compris, ou ressenti, cela prend du temps.

Apprendre la sophrologie comprend les mêmes étapes, cela demande du temps, sous peine de passer à côté de l’essentiel
Bien sûr on peut apprendre par cœur, faire des fiches, réciter des phrases, mettre en équations mathématiques ou en schémas, mais si on n’a pas soi-même perçu, senti et surtout vécu quelque chose, perçu des émotions, au sens de la vivance de Caycedo, on n’est pas dans la sophrologie, dans sa réalité objective, dans ce qui la caractérise.

En sophrologie, rien ne peut être explicatif et il faut capter la différence essentielle entre la cure psychanalytique au sens de Freud qui cherche à expliquer, à trouver des causes et l’analyse existentielle au sens de Binswanger qui recherche ce qui a été vécu par un individu, pour pouvoir comprendre ce que la sophrologie peut apporter d’original à la relation sophrologue-sophronisant, et qui va permettre à une personne d’avancer en fonction d’elle-même, de ce qu’elle est profondément et à la recherche de ses valeurs propres.

Apprendre la sophrologie ne peut se faire rapidement
La comparaison peut encore se tenter avec la philosophie : on ne peut pas lire de la philosophie rapidement.
Au démarrage d’un ouvrage, on pense qu’on va l’avaler en quelques heures, on est passionné, on se met à l’intérieur.
Et très vite, on s’arrête sur un paragraphe, sur une ligne, voire sur un mot.
On s’arrête et on réfléchit.
On revient en arrière.
On s’approprie le passage.
Des idées apparaissent, des liaisons se font. Les images surgissent, se bousculent.
On s’enrichit d’une pensée qui évolue, qui se construit, on progresse.
Et c’est bien là le côté réellement passionnant de la discipline.
On n’apprend pas par cœur, c’est absurde, on apprend à faire fonctionner sa pensée, à réfléchir, à trouver du sens, qui va devenir son propre sens, son schéma de pensée mais au sens d’ouverture sur la vie, de progression existentielle.
Pour soi-même, son être propre, pour sa vie.

En sophrologie, c’est la même chose, on plonge dedans dès les premiers jours de formation.
On est passionné, car on ne fait pas de la sophrologie par hasard, on est à la recherche de quelque chose, quelquefois on ne sait pas très bien quoi, quelque chose de mieux, quelque chose avec plus de sens, plus de valeurs.

On découvre, on est heureux d’intégrer les premières informations et on comprend vite qu’il va falloir du temps pour s’approprier ce qui fait la nature réelle de la sophrologie, ce qui en fait tout son sens, toute sa force.
Car comment être sophrologue si on n’a pas installé en soi-même la vivance, sa propre vivance d’abord, ce que l’on vit en soi pendant les séances pratiques, pour avoir ensuite la capacité de permettre à l’autre, par exemple son futur client ou sophronisant d’installer sa propre vivance également.

On comprend alors qu’on a besoin de temps pour intégrer en soi des concepts nouveaux, originaux, différents, pour savourer tout ce que cela apporte de liberté existentielle.
On comprend que la pratique est essentielle et, comme en philosophie, on s’arrête sur une technique, on ressent, on revient en arrière, on recommence.
On pratique, encore et encore.
On regarde autrement, on progresse, on se change.
Les mécanismes s’installent.
On pratique encore.

Peu à peu arrive, à partir de sa propre expérience, la sensation d’être plus fort, plus compétent, pour enfin transmettre……on devient sophrologue.

Une vie, une existence. Une seule.

Alors la vivre, la savourer, prendre le temps pour évoluer, se trouver, trouver ce qui fait sens, le sien, pas celui qu’on veut bien nous imposer.
Exister vraiment.

Faire l’expérience de sa liberté pour, comme l’a dit Michel Foucault, « ne pas oublier d’inventer sa vie »

Voilà ce que la sophrologie promet.

Brève par Chantal Tortochot, 26 août 2021